De quoi s’agit-il?

La municipalité de Montigny vient de faire paraître son premier rapport annuel de développement durable.

L’éditorial le présente comme “un document qui permet de recenser ce qui se fait déjà au sein de nos services et plusieurs de nos actions sont d’ailleurs reconnues par divers labels. Certains de nos services faisaient déjà du développement durable sans le savoir” .

Nous l’avons lu attentivement. Nous avons souvent été irrités par le décalage entre ce qui est dit, suggéré dans ce rapport, et la réalité que nous constatons tous les jours en tant qu’ignymontains et/ou conseillers municipaux. Notre vécu est que la municipalité ne fait jamais de zèle pour tout ce qui concerne l’écologie et le social contrairement à d’autres domaines comme la sécurité. Seul le réglementaire prévaut. On ne sait jamais, ça pourrait être risqué d’explorer, d’expérimenter, de faire participer…

Notre réaction à chaud

Mieux vaut tard que jamais?

Bienvenue à Montigny qui découvre en 2022 les vertus des Objectifs Développement Durable qui existent depuis … 2015 !

Mais avant eux, il y avait eu les Objectifs du Millénaires pour le Développement (OMD : 2000) et puis encore avant, on parlait déjà de développement durable depuis … 1987 !

Pendant de longues décennies, la ville de Montigny a complètement ignoré ces enjeux, leur tournant le dos délibérément. Il n’y avait pas problème ! En 2008, le développement durable apparaît enfin dans la délégation d’un adjoint pour disparaître au mandat suivant et être recyclé en « transition écologique » en 2020. Pendant ces longues années de traversée du désert pour le développement durable, d’abord les élus écologistes, puis les élus de gauche réunis, ont porté ces enjeux de manière systématique lors des réunions du conseil municipal.

Il faut attendre 2021 pour voir le recrutement d’une responsable Développement Durable pour la ville de Montigny. Certes pour une ville de 35 000 habitants, ce n’est pas obligatoire. Mais des communes plus petites que Montigny, y compris dans les Yvelines, se sont emparées de ces enjeux depuis de nombreuses années !

Pourtant, les sujets restent traités de manière superficielle malgré la ténacité de l’adjoint qui en est en charge. Les maires successifs les font passer au second plan sous le sourire narquois du chef de cabinet. Les priorités sont ailleurs !

Des longues années perdues !

Un rendez-vous manqué

Ce rapport nous laisse sur notre faim. Il en émane un relent de rendez-vous manqué avec l’urgence climatique dans laquelle nous nous trouvons.
Les objectifs et indicateurs de suivi sont promis pour “demain” (c’est quand demain?). Le maire l’indique dans l’édito : “ce rapport est une première étape”, “c’est une démarche qui s’inscrit dans la durée” et chaque année verra un nouveau rapport. Que le GIEC se rassure ! Que le colibri ne s’affole pas ! Montigny poursuit son développement écologique commencé il y a bien longtemps et s’engage sur le chemin responsable de la transition durable (sic). “La prochaine étape sera la définition de nos propres objectifs et des indicateurs de suivi” . Cela peut attendre, il n’y a pas d’inquiétude particulière à avoir…

Eh bien non, nous ne pouvons pas attendre !

Les indicateurs chiffrés indispensables à un état des lieux initial brillent par leur absence. Combien de logements sont isolés à Montigny ? Quelle production d’énergie renouvelable ? Quelle part modale pour le vélo (alors que la ville est quasiment plate et que les distances à parcourir peuvent quasiment toutes l’être à vélo) ? Quel ratio entre les investissements destinés à rénover la voirie pour la voiture et ceux consacrés aux mobilités actives (vélo et marche à pied) ?
Cela fait plus de 15 ans que les élus écologistes demandent un tableau de bord montrant la réduction de la consommation d’énergie sur les bâtiments publics. “36% des bâtiments communaux rénovés pour une réduction de l’empreinte carbone” : aucune valeur du gain n’est fournie. Si les travaux d’isolation sont une réalité indéniable, quels en sont les effets ?
Enfin, ce premier rapport développement durable aurait pu être l’occasion de montrer les progrès observés sur les consommations d’énergie et les émissions de gaz à effet de serre constatés pour le fonctionnement des services de la commune mais les chiffres indiqués sont toujours partiels (on nous parle de -27% sur le gaz alors que seule une vision globale, tous types d’énergie confondus, a un sens).

Nos commentaires partie par partie

Partie 1 : Le développement durable c’est quoi?

Cette partie, pédagogique, présente les grandes lignes de ce qu’on appelle “développement durable”.

Partie 2 : Le développement durable à Montigny

Cette partie présente quelques chiffres plus ou moins précis, des généralités telles que “ville éco-responsable”, “ouverte et citoyenne”, “inclusive et solidaire”. On ne peut qu’être d’accord avec ces grands principes. La mise en avant de 6 labels reconnaissant les actions de la ville donne l’illusion d’une municipalité volontaire voire innovatrice en matière de développement durable. Et pourtant…

Engagée pour la nature, vraiment?

Quelle n’est pas notre surprise de voir que la ville possède le label “territoire engagé pour la Nature”! Avec deux libellules gagnées au concours des “capitales françaises de la biodiversité” ?
Déjà la transmutation de l’aire du bateau pirate en parking sonnait faux en matière de préservation de la nature.

Mais comment le maire ose-t-il mettre ce label en avant alors qu’il vient de faire voter au conseil municipal d’avril une modification du PLUi, conduisant à l’abattage annoncé d’une partie des arbres du Bois Mouton, situé au pas du Lac, pour laisser place à l’installation hypothétique des bureaux d’un grand groupe ?  Sous prétexte que la demande de bureaux est supérieure à l’offre sur Montigny, il faudrait céder aux sirènes d’un profit facile ? Cette ineptie a désespéré jusqu’à l’adjoint en charge des espaces verts, de la voirie et du cadre de vie. On ne peut que partager ses propos dans une tentative vaine de faire entendre raison au maire :
“En tant qu’élu de la ville mais aussi de quartier, j’aimerais que l’on préserve ce poumon vert et cet îlot de fraîcheur qui fait 2 hectares,[…]. Sur ces deux hectares partiellement marécageux il existe aujourd’hui un boisement ancien qui a une quarantaine d’années, avec des chênes, des peupliers et des frênes, des sycomores. On a certains beaux sujets qui font plus de 20-25 mètres. […] Il y a plusieurs années on a su dans le quartier du Village créer un verger pour calmer les tentations des promoteurs, du coup j’attendais une même volonté politique de l’équipe municipale, et puis la même délicatesse pour ne pas sacrifier ce quartier.”

Ceci est d’autant plus choquant que, page 18 du rapport, on lit “la ville est signataire de la charte de l’arbre de SQY.” Parmi les engagements : respecter les arbres en place. On lit aussi que le PLUi ambitionne “d’éviter la perte de biodiversité”. De nombreux conseillers municipaux pourraient profiter de la présence sur la commune d’un UFR de sciences pour apprendre comment on préserve la biodiversité! Ainsi que le rôle de la végétation pour apporter de la fraîcheur. (18 mai 2022, 16h40. 35 degrés à l’ombre place Georges Pompidou, 27 degrés dans le quartier arboré des prés…)(https://www.uvsq.fr/luvsq-organise-ses-rentrees-climat)

Chêne centenaire du bois mouton
Bois-Mouton : un chêne centenaire condamné

Partie 3 : le développement durable au cœur des services municipaux

Une multitude d’actions sont présentées. Le côté “éco-responsable” est largement mis en avant : 9 pages soit la moitié de la partie. C’est une forte préoccupation : p 10, parole d’élu : “il ne faut pas attendre la réglementation pour passer à l’action” et on se dit que dans ces pages on va en trouver la concrétisation.

Mais où ?

Dans le plan vélo ?

installation de 8 arceaux, devant André Malraux” !  On manque un peu de comparaison, 970 places de stationnement vélo sur la ville, soit 0.02 emplacement par habitants. Là où la ville de La Rochelle compte 6,5 places pour 100 habitants, nous n’en comptons que 2,7, si nos calculs sont bons, ce qui n’est pas beaucoup pour une ville qui se dit cyclable. Le maire parcourt-il sa ville en vélo ?

Et, une mention en bas de la page 20 précise qu’une analyse des circulations douces est faite pour chaque rénovation de voirie ; on pourrait penser qu’après l’analyse des solutions sont mises en place. Pour preuve que non, l’avenue Kessel a été rénovée très récemment et il n’y a aucune voirie cyclable ! Alors même que c’est l’avenue qui dessert un équipement voulu comme majeur pour les Ignymontains. Le “c’est pas nous qui l’avons fait, c’était avant, laisser nous le temps de mettre en œuvre nos idées” ne tient pas : le maire actuel était chef de cabinet et la plupart des adjoints étaient déjà aux manettes lors du précédent mandat !

Dans l’isolation des bâtiments ?

La construction du forum municipal Charles Aznavour, inauguré début 2022, est alignée sur la norme RTE 2012 mais le bâtiment a été inauguré en 2022 peu de temps après la mise en place d’une nouvelle réglementation thermique plus exigeante.

La rénovation programmée du gymnase Pierre de Coubertin, sera-t-elle alignée elle aussi sur une norme qui sera obsolète avant même le début des travaux ? La suggestion à plusieurs reprises des élus de AIMES de faire de cette rénovation un projet phare pour la ville a été dédaignée. Il faudra se contenter du service minimum.

Ou peut-être dans l’éclairage urbain?

L’accent est mis à plusieurs reprises sur l’augmentation de la part d’éclairage à LED. En fait, elle se contente de prendre acte des directives officielles. Mais ce qui prime, c’est d’éclairer uniquement là où et quand il y a un réel besoin. Par exemple au Forum des Arts, était-il nécessaire d’éclairer les rampes d’escalier, les encadrements de porte en permanence? était-il nécessaire d’avoir une fresque lumineuse sur l’esplanade? Comme dirait notre le maire, la meilleure économie d’énergie c’est celle que l’on ne dépense pas. Dans les faits, la ville refuse conseil municipal après conseil municipal d’étudier la réduction de la durée de l’éclairage nocturne. Alors que cette dernière est permise par la souplesse de l’éclairage à LED. Quel dommage pour une ville qui met en avant son côté “smart city” et son souci de préserver la biodiversité !

Dans le choix d’impression du journal papier sur du papier recyclé et avec une technologie Waterless ?

Mais pourquoi imprimer 22000 exemplaires (plus une version téléchargeable) pour moins de 15000 ménages quand on sait que de nombreux exemplaires distribués dans les boîtes aux lettres finissent directement à la poubelle sans être ouverts. Pour être sobre Montigny pourrait distribuer le journal à la demande.

Alors, où?

Peut-être l’innovation se niche-t-elle dans cette liste aux relents d’inventaire à la Prévert : le nettoyage au vinaigre blanc des locaux “petite enfance” (p 21) ; l’installation de boîtes à livres ; la diminution des photocopies du service logement; le permis de planter ; le label LPO ; la remise des colis de Noël à 1200 seniors de la ville (des colis durables pour le développement de seniors durables ?) ?

Nous cherchons encore. Et ce que nous entendons lors des délibérations du conseil municipal n’est pas pour nous rassurer…

Ce que nous espérons du rapport 2022

Ce que nous aurions aimé trouver dans ce rapport : des perspectives d’avenir !

Par exemple, sur des sujets très simples qui concernent directement les habitantes et les habitants :
* 20% de bio à la cantine. La municipalité compte-t-elle en rester là ? Ou bien vise-t-elle 30, 40, … 100% de bio, et dans quel délai ? Le gaspillage alimentaire : une vraie politique de restauration collective locale, de qualité, avec des produits respectant l’environnement et bien cuisinés serait bien plus efficace que les actions de sensibilisation.
* le vélo : la ville a été classée deuxième dans le baromètre de l’Association la Fédération des Usagers de la Bicyclette. Les élus souhaitent-ils de profiter du maillage mis en place via les référents vélos pour améliorer ses scores, voire, atteindre la première place ? Quel challenge se donne-t-elle ? 43 km de circulations douces communales et intercommunales : le frein principal aux usages des circulations douces est la discontinuité entre les zones de ces circulations douces. Quels sont les projets pour améliorer cela ?
* Parmi les initiatives à destination des citoyennes et des citoyens se trouvent le droit à planter et les repar’café. Ces actions sont intéressantes car elles peuvent être mobilisatrices. Mais rien sur le site internet de la ville ne permet de connaître leur existence, sauf à passer du temps à dérouler menu après menu. Est-il prévu qu’elles soient mises en avant lors de la refonte du site ?

Et sur des sujets plus complexes, deux exemples:
* Nous attendons une information sur l’évolution de la répartition des modes d’occupation des sols, au-delà du schéma coloré de la page 11. Quels objectifs se donne la municipalité pour les années à venir ? Quelle surface d’espaces verts devons-nous nous attendre à voir encore sacrifiés ?
* La municipalité se satisfait d’avoir déjà atteint les objectifs pour 3 catégories de polluants de l’air (SO2,COV,NH3). Il s’agit de polluants issus de l’industrie et de l’agriculture. Montigny n’est ni une commune industrielle, ni une commune agricole. L’atteinte de ces objectifs est donc facile. Par contre, concernant les NOx et les PM2.5, la municipalité n’indique pas les actions qu’elle compte mettre en œuvre pour atteindre les objectifs. Que propose-t-elle également concrètement pour réduire les émissions de GES?

Nous constatons enfin que Montigny collectionne les labels comme d’autres collectionnent des médailles sur leur poitrine. Fort bien ! Quels sont les prochains labels visés ? Le label “nuits étoilées” ? Et parmi ces labels, combien concernent les deux enjeux principaux mentionnés en introduction pour réduire les émissions de gaz à effet de serre ? … Un label « Territoire engagé pour la transition écologique » existe pourtant !

Pour finir sur une note positive

Les actions sont déjà nombreuses, les agents sont motivés pour que les choses évoluent, et nous savons que la plupart des ignymontaines et ignymontains sont en attente. … La marge de progrès existe. … Il suffit (ou plutôt, il suffirait, … cette fois, le conditionnel est adapté) d’une réelle impulsion politique et de choix budgétaires en accord avec les enjeux. … Montigny-le-Bretonneux pourrait être sur la bonne trajectoire pour devenir réellement innovante en matière de développement durable, conformément à l’ambition affichée en introduction de ce rapport.

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