You are currently viewing La douloureuse histoire du réchauffement climatique

Réchauffement climatique : Histoire d’une difficile prise de conscience

Dès la fin XIXe siècle

Le suédois Svante Arrhénius attirait l’attention sur le réchauffement lié aux rejets de gaz carbonique liés à l’utilisation du charbon. Il faudra attendre les années 1980-2004 pour avoir une confirmation scientifique de l’influence néfaste de l’industrialisation sur le climat. Et en 2022 les sceptiques sont encore (trop) nombreux et (trop) influents !

Années 70

Le problème de l’action potentielle des activités humaines sur le climat commence à préoccuper les scientifiques.
Début de l’étude des glaces polaires. En Antarctique, australiens, russes, français, américains, japonais, anglais forent la glace pour en extraire des carottes cylindriques et analyser les bulles d’air qu’elles contiennent.

Carottes de glace

1979

L’Organisation Météorologique Mondiale (OMM) met sur les rails le Programme de Recherche Mondial sur le Climat suivi par d’autres initiatives qui vont permettre d’amplifier les recherches sur l’évolution passée et future de notre climat.

Années 80

Malgré la guerre froide les scientifiques russes accueillent une équipe française dans leur base antarctique de Vostok, avec le soutien logistique des américains.
Les analyses des carottes de glace permettent de connaître la température et la composition de l’atmosphère au moment où la glace s’est formée. Les scientifiques remontent plus de 150 000 ans en arrière !
Ils découvrent que la température de l’atmosphère est intimement liée aux concentrations de dioxyde de carbone et de méthane. Ils posent l’hypothèse d’un réchauffement climatique engendré par les activités humaines riches en émissions de gaz à effet de serre tels que le CO2 et le méthane. Et prévoient les conséquences : hausse du niveau de la mer, perturbations climatiques…

1987

Les travaux de Vostok font la une de la prestigieuse revue Nature. Ces publications ont un retentissement international, même si de nombreuses personnes les reçoivent avec scepticisme.

1988

Les États-Unis connaissent une des pire saison estivale de leur histoire (records de températures, sécheresse; la moitié du parc national de Yellowstone est en feu).

Le 23 juin, une commission parlementaire auditionne des scientifiques sur les anomalies météorologiques qui sévissent. Parmi eux, James Hansen, directeur du Goddard Institute for Space Studies, laboratoire d’étude du climat de la NASA, fait sensation. Il annonce que l’ampleur des événements excède la variabilité naturelle du climat et que la Terre est entrée dans une phase de réchauffement dû à l’activité humaine . Contre l’avis de la majorité de ses pairs qui estiment que ce n’est pas encore sensible -, il se dit sûr de son fait  “à 99 % “. Les déclarations de James Hansen font la « une » du New York Times.

Création du GIEC (Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat), sous l’gide des Nations Unies. Il rassemble 195 États membres. Le français Jean Jouzel l’intègre en 1994 et en deviendra vice-président en 2002.

1992

Plus de 178 pays se rencontrent à Rio de Janeiro pour la conférence décennale de l’ONU sur l’environnement et le développement.
Signature de la Convention-Cadre des Nations unies sur les changements climatiques (CCNUCC). Cet accord prévoit la tenue annuelle de COP (conferences of the parties). Ces rassemblements mondiaux viseront à renforcer les engagements pris et à évaluer leur degré d’application.

1995

Première COP à Berlin.

1997

Protocole de Kyoto
Il prévoit des engagements différenciés selon les pays, sur le principe d’une responsabilité historique distincte entre pays industrialisés et pays en développement.
Il comprend des engagements contraignants pour 38 pays industrialisés, avec un objectif de réduction moyenne de 5,2 % entre 2008 et 2012, par rapport aux émissions de 1990. En revanche, les pays en développement comme le Brésil, la Chine ou l’Inde, sont parties prenantes au protocole mais ne sont pas soumis à la réduction d’émissions.
Il entrera en vigueur en… 2005, suite à sa ratification par la Russie.

1998

Les recherches continuent à Vostok. Le forage atteindra en 1998 la profondeur de 3623 mètres là où la glace est âgée de 420.000 ans.

Les résultats sont une confirmation éclatante du lien entre climat et gaz à effet de serre et donnent une explication cohérente des grandes variations climatiques naturelles de notre Quaternaire à l’échelle du million d’années. 

2004

Projet EPICA, toujours en Antarctique. Le socle rocheux est atteint  à une profondeur de 2871 mètres, ce qui correspond à 800 000 années en arrière.

 


Ces 3 courbes mettent en évidence le lien entre concentration de gaz à effet de serre et température.

Notre atmosphère n’a jamais connu depuis 800 000 ans de teneurs aussi élevées de gaz à effet de serre qu’actuellement, suite à l’activité industrielle. Le réchauffement climatique en est la conséquence logique, avec son cortège de dérèglements prévisibles.

2007

L’ancien vice-président américain Al Gore et le GIEC obtiennent le prix Nobel de la paix 2007.
Le prix leur est conjointement décerné pour “leurs efforts de collecte et de diffusion des connaissances sur les changements climatiques provoqués par l’homme et pour avoir posé les fondements pour les mesures nécessaires à la lutte contre ces changements”.

2009

COP15 Copenhague, forte mobilisation citoyenne. 192 pays.

On attendait beaucoup de cette conférence qui avait pour ambition d’aboutir au premier accord global de lutte contre le changement climatique. Le but était de fixer la feuille de route de la gouvernance mondiale du climat sur la période 2013-2017.
Mais les tractations sont sabotées par des rumeurs jetant le discrédit sur les travaux des chercheurs. Ces rumeurs se révéleront infondées mais le mal est fait.
La conférence se soldera par un échec : un accord de dernière minute négocié entre 26 pays seulement sera présenté mais non ratifié. En particulier, les États-Unis et la Chine refuseront que leurs objectifs de réduction soient contraignants.

2010

Parution du livre de Claude Allègre, « l’imposture climatique ou la fausse écologie», qui déclenche une polémique. Claude Allègre est un géochimiste réputé dans son domaine. Il a été ministre de l’Éducation Nationale de 1997 à 2000. Il fait partie en 2010 des climato-sceptiques qui dénient la responsabilité humaine sur le changement climatique.
Un rapport de l’académie des sciences clôt la polémique, en concluant que le réchauffement est bien dû aux activités humaines via la concentration en gaz à effet de serre, CO2 en premier.

2015

COP21 de Paris. Elle aboutit à un accord international applicable à tous les pays, visant à maintenir le réchauffement mondial à 1,5- 2°C, conformément aux préconisations du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC).
Il a été ratifié par 195 pays représentant 96,98% des émissions. Il est entré formellement en vigueur le 4 novembre 2016 quelques jours avant la COP22.
Il vise la neutralité carbone pour la fin du siècle.

Mais en attendant, les GES continuent à s’accumuler… et les politiciens ne semblent pas prendre la mesure de l’urgence, malgré les conséquences qui commencent à devenir évidentes : ouragans, cyclones, inondations, méga-feux de forêt…

2018

Le 28 août, Nicolas Hulot, figure très médiatisée de la lutte contre le réchauffement climatique, et alors ministre de l’écologie, démissionne en direct sur France Inter : « devant l’immobilisme du gouvernement, je ne veux pas donner l’illusion que ma présence est à la hauteur sur ces enjeux-là et donc je prends la décision de quitter le gouvernement. »
Le Brésil se retire des accords de Paris.

2021

COP26 Glasgow

Les engagements de court terme placent au mieux la planète sur une trajectoire d’augmentation des températures de 2,3°C, loin de la cible de 1,5°C des accords de Paris. L’espoir de stabiliser les températures à 1,5°C en fin de siècle s’amenuise.

2022

Deuxième et troisième volets du sixième rapport du GIEC


Le résumé à l’attention des décideurs se conclue par cette phrase :

“Les preuves scientifiques cumulées sont sans équivoque : le changement climatique est une menace pour le bien-être humain et la santé planétaire. Tout retard supplémentaire dans l’action mondiale concertée et anticipée en matière d’adaptation et d’atténuation des effets du changement climatique manquera une petite fenêtre de tir, qui se referme rapidement, de garantir un avenir vivable et durable pour tous.”

Été catastrophique un peu partout dans le monde. Des inondations dévastatrices touchent le Pakistan. En France, canicule, sécheresse et méga-feux.
Du 6 au 18 novembre, COP27 à Sharm El-Sheikh, 30 ans après la signature de la Convention-Cadre des Nations unies sur les changements climatiques.

En conclusion

Difficile de ne pas tomber dans l’éco-anxiété ! Écoutons ce que Jean Jouzel a à nous dire. Ce chercheur climatologue a participé aux campagnes dans l’Antarctique. Il a été vice-président du GIEC.

Aujourd’hui, il met toute son énergie à mettre ses connaissances à la portée du grand public et à inciter les décideurs politiques à avoir une politique volontariste en matière d’éducation à l’environnement. Il a donné une conférence le  11 octobre 2022  au laboratoire de l’Observatoire de Versailles – Saint Quentin en Yvelines.

Il est convaincu que la transition écologique ne se fera pas sans solidarité internationale ni changement de paradigme économique. Il faut aller vers un modèle qui donne un vrai prix au carbone et ne considère pas que tout ce que nous donne la nature est gratuit. Il faut avoir du respect pour la nature, et un regard attentif sur la préservation de la biodiversité.

Il nous dit que les scientifiques ont fait leur travail de recherche et d’alerte. Et que, face à l’inertie des décideurs, il faut agir, maintenant, chacun.e à son niveau. Par exemple :

  • Utiliser son bulletin de vote.
  • S’engager de manière individuelle, pour infléchir les politiques, notamment les politiques locales : s’impliquer au niveau local en politique.
  • S’impliquer dans des associations.
  • Diffuser l’information auprès du grand public.
  • Sachant qu’en France plus de la moitié de nos émissions sont liées à se nourrir, se loger, se déplacer : réfléchir à ce qu’on appelle «les petits gestes», au quotidien. Sont-ils vraiment indispensables ?
  • Et, il nous encourage à mobiliser toute notre inventivité pour trouver les solutions qui nous permettront de nous adapter à ce nouveau monde qui nous attend.

“L’action compte, et c’est aujourd’hui qu’il faut agir”.

Sources

Site internet du chercheur climatologue Claude Lorius.

Présentation de Jean Jouzel sur Futura-sciences.

Fiches du site gouvernemental Vie publique.

Notes issues de la projection du documentaire “Jean Jouzel dans la bataille du siècle” projeté le 11 octobre 22 à l’Observatoire de Versailles Saint Quentin.

Vidéo France Inter “Nicolas Hulot : je prends la décision de quitter le gouvernement”

Wikipedia : Claude Allègre

Le réchauffement climatique lié aux activités humaines est connu depuis la fin des années 70 : article de Stéphane Foucart paru dans le journal le Monde du 12 décembre 2019 : “des décennies de prêche dans le désert”.

Cette publication a un commentaire

Les commentaires sont fermés.